La rantela

Conte : Le roi de Noël

24 Décembre 2009, 16:44pm

Publié par La rantela



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"Noël, Noël! Chaque année, au moment où les jours raccourcissent le plus, c'est la même chose, les habitants du royaume décorent leurs maisons de couronnes, allument des lumignons qui brillent dans le noir et se saluent joyeusement.
Chaque année, c'est pareil, ils m'oublient complètement, ça ne peut pas durer!"
C'est ce que se disait le roi de ce petit royaume. Ce roi, fort disgracieux au demeurant, était d'un caractère fort égoïste. Il ne supportait pas que son peuple s'occupe d'autre chose que de l'admirer, le vénérer. Ce qui le rendait particulièrement jaloux, c'était cet engouement pour une fête qu'il n'avait pas décrétée et si les adultes faisaient encore quelque effort pour s'intéresser à sa personne, ce n'était pas le cas des enfants qui l'ignoraient complètement. Cette année-là, ils passèrent totalement les bornes car on annonça le passage public du Père Noël, ce qui n'était jamais arrivé. Ce fut une grande effervescence pour préparer l'accueil du célèbre personnage et on oublia quelque peu le roi. Cela le mit dans une rage folle et il résolut de se venger.

    Le grand jour arriva. Toute la population se retrouva en habits de fête sur la grand-place pavoisée de mille couleurs. Soudain, une grande clameur retentit: on venait d'apercevoir le traîneau du Père Noël traversant les nuages. Le Père Noël atterrit en douceur sous les applaudissements et les vivats mais à peine eut-il mis le pied à terre que des gardes se saisirent de lui et l'emmenèrent rapidement, laissant les gens sidérés. Puis chacun se ressaisit et tous se dirigèrent vers le palais royal où les gardes leur bloquèrent le passage. Les commentaires allaient bon train quand le grand chambellan fit son apparition. Le silence se fit et il annonça que le roi avait décidé l'arrestation du Père Noël car ses espions lui avaient rapporté que celui-ci complotait pour prendre le pouvoir. "D'ailleurs, précisa le chambellan, ses papiers ne sont pas du tout en règle et il n'a pas accepté de dire à la police d'où il vient... Toutefois, sa Majesté ne voulant pas priver ses sujets d'une fête, le roi s'occupera lui-même de la distribution des cadeaux. En attendant, rentrez chez vous." Lentement, la foule se défit et en murmurant, les gens rentrèrent chez eux.

    Le Père Noël avait été enfermé dans une geôle profonde et obscure. Personne lui avait rien dit et il ne comprenait pas ce qui se passait. Il était très ennuyé car il lui restait beaucoup de travail pour préparer sa tournée.



    Pour mieux se distinguer du Père Noël, le roi décida de distribuer les cadeaux à l'avance, le jour de sa fête, qui était la St Xavier. Il avait fait venir d'un pays lointain, toutes sortes d'objets à son image: des tasses, des cadres, des serviettes, des calendriers, des assiettes,.... tous portant son portrait en couleurs avec la mention "Vive le Roi, Xavier!" ou "J'aime mon roi Xavier!" ou encore "Xavier est le plus grand!". Le matin de la St Xavier, un lourd convoi sortit du palais royal, précédé du carrosse du roi. Les crieurs publics avaient annoncé l'interdiction de sortir de sa maison et d'inviter qui que ce soit et le grand chambellan avait fait recruter des vagabonds pour qu'ils applaudissent le roi lors de son passage, on ne sait jamais. Inutile de dire que cette distribution forcée ne plut pas beaucoup à la population et en tous cas pas aux enfants qui n'eurent ni jouet, ni friandise. Les bibelots du roi n'étaient pas ce que chacun espérait et plus encore, l'absence de fête, de retrouvailles, plongea chacun dans une grande tristesse. Beaucoup d'enfants pleurèrent, quelques adultes s'énervèrent et ce fut sous les quolibets que le convoi du roi regagna en toute hâte le palais sans même avoir fini le tour de la ville. Le roi, dans son immense égoïsme, ne s'aperçut pas du trouble de son peuple et il fut fort surpris le lendemain lorsqu'il vit aux portes du palais une grande manifestation demandant la libération du Père Noël. Il se mit en colère vitupérant contre ces gens qui n'étaient pas reconnaissant pour ce qu'il avait fait pour eux et qui ne comprenaient pas qu'il agissait pour leur bonheur. Il les traita de conservateurs, de passéistes, d'ingrats, fit arrêter les meneurs et disperser la foule.
   
    Les prisonniers rejoignirent le Père Noël qu'ils trouvèrent en train de raconter des histoires à un auditoire de souris, de rats et autres araignées. Ils le mirent au courant des agissements du roi. Le Père Noël hocha la tête et leur recommanda de ne pas trop s'inquiéter, que les choses finiraient par s'arranger.. Et il reprit ses histoires pour les aider à chasser leurs idées noires.

    Le surlendemain, on arrêta un petit groupe de personnes qui avaient essayé de délivrer les prisonniers par un coup de main audacieux. On renforça la garde, ce qui dissuada d'autres téméraires de tenter l'aventure. Le découragement gagna la population, une chape grise de tristesse s'abattit sur la ville. Les enfants ne voulaient plus manger, les gens ne savaient quoi faire, ils ne pouvaient plus sortir de chez eux car les gardes contrôlaient tout le monde et arrêtaient les passants parfois sans qu'on sache pourquoi. Le roi s'était enfermé dans son palais et n'en sortait plus, déçu par ses sujets.

    Et puis, un jour, par délaissement ou par malice, un enfant prit un portrait laissé par le roi, y gribouilla une grosse moustache et des verrues et le posa bien en évidence sur une fenêtre. Quand sa mère s'en aperçut, il était trop tard, des gardes l'avaient vu: ils arrêtèrent l'enfant et la mère et les conduisirent en prison où le Père Noël rassuraient les prisonniers et continuait de raconter ses histoires, maintenant une petite lumière de joie et d'espoir dans leur coeur. D'autres personnes, des enfants, des adultes, gribouillèrent à leur tour les portraits du roi et eux aussi, on les arrêta. Mais le phénomène prit de l'ampleur, les gardes ne savaient où donner de la tête, ils arrêtaient à tour de bras mais les portraits continuaient de se répandre: ici, on avait ajouter des oreilles d'âne au roi, là c'était un nez de cochon...Bientôt les caricatures du roi envahirent toute les rues de la ville, ses monuments, ses églises... Les murs du palais eux-mêmes furent bientôt recouverts et la vague finit par envahir l'intérieur du palais. Le roi ne pouvait plus faire un pas sans qu'un nouveau dessin moqueur n'apparut devant lui. Pour un portrait qu'on décrochait ou qu'on effaçait, il en revenait deux, trois, quatre,...
Le Roi en trouva dans sa chambre, dans son lit, dans son ,.... et un jour, il craqua, enfourcha son cheval et suivi de quelques fidèles, partit au galop et disparut. On ne le revit jamais.

    On libéra les prisonniers et le Père Noël put faire sa tournée juste à temps. Quant aux habitants, fier de leur liberté retrouvée, ils se réunirent et choisirent les plus sages d'entre eux pour diriger le pays.


Alain,
Il s'agit de la version écrite d'un conte que j'ai créé en 2007, pour un spectacle de Noël.

A raconter ce soir, au coin du feu....

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